Encore un roman. Encore une famille tordue. Des mères insensibles, des époux dispersés, des histoires d’amour et de fesses, des amies précieuses, indéfectibles. Mais pour cette fois, Philippe Djian parle au nom d’une femme, Myriam. Autre nouveauté. Il fait un pas de plus dans le style allusif. La révélation à retardement. Le dialogue, la tempête, et plus tard, l’objet de tout cela. Le lecteur se trouve ainsi obligé de baisser les bras, de renoncer à ses propres schémas et stéréotypes, cesser toute résistance, faire taire son imagination pour disséquer le pourquoi du comment. Philippe Djian nous oblige à le suivre.
Le grand vide de son début de roman inquiète. Myriam, faible, abusée, sans aucun doute, mais sans détails, c’est effrayant. C’est la porte ouverte à nos peurs (de femme). Et puis cette Myriam ne s’en laisse plus compter, prend du poil de la bête (en visitant régulièrement un zoo, si, si). Mariage, maternité, aventures, le travail, la vie quoi. Nous observons cette femme-enfant, longtemps retirée au monde, grandir, prendre du poids. Philippe Djian nous sert tout cela par le biais des essentiels : les frictions de ses personnages, les moments de calme apaisés sur la terrasse, refuge dans la cigarette et alcool. Avec le temps, Myriam se pare de cette sagesse calme, ce sens de la formule directe que nous aimerions tous avoir. Les mots justes, dits avec assise, au bon moment (celui de la limite), repoussant le conflit à plus tard. Accueillant la haine et le mensonge avec philosophie, avec ce haussement d’épaules, qui nous dit que la nature est ce qu’elle est, que nous n’y pouvons rien, nous. Sauf à être cléments.
Et nous de tirer conclusion que. Un. Nos vies valent bien quelques combats – que nous gagnerons, assurément. Deux. Nos vies méritent aussi qu’on y aménage de précieuses oasis.