Les logiciels apprennent et prédisent. Ils apprennent. De la donnée des foules, de nos cycles standards et répétitifs, de nos tendances à faire comme d’habitude, de nos petites ou grandes vies rangées, en moyenne. Ils apprennent doucement, en silence, ils repèrent nos habitudes. Puis ils prédisent. Ils nous aident. Ils nous suggèrent de…
Évidemment, la question de la reproduction à l’infini des schémas et des cadres se pose, tout comme celle du droit à l’écart. Comment allons-nous prendre des chemins de traverse, si les machines nous gardent – malgré elle, au nom de notre passé – dans le droit chemin, et nous entraînent vers un futur parfait, prédit et tailor-made ? Le métier qui nous ira, par le chemin que nous aimerons, ou qui conviendra le mieux à nos capacités. Peut-être, les machine apprendront-elles à lâcher du lest, à nous livrer de petites folies de temps en temps, pour soulager la norme, pour satisfaire nos envies d’autre et d’ailleurs. Peut-être.
Mais quid de la vélocité des logiciels qui nous accompagnent chaque jour pour comprendre nos brisures de vie. Celles du déclic. Celles du destin. Quid de la capacité des machines à comprendre que ces fleurs que nous achetions n’ont plus lieu d’être nos préférées, et qu’elles nous feraient presque mal aujourd’hui puisque la personne qui nous les offrait a disparu. Comment les machines apprendront-elles à ne plus nous suggérer d’écrire à un tel ou une telle puisque nos routes se sont séparées ? Quid de l’adaptation des machines à nos propres éclairs de lucidité, imprévisibles. De ceux qui nous font dire : je ne peux plus, je ne veux plus, je suis prisonnier, je change. Comment les machines comprendront-elles nos étapes de vie, si personnelles, si intimes, ces marches franchies, on ne sait pas bien comment – parfois bien malgré nous et dans le chaos.
Rassurons-nous. En moyenne, tout se passera bien. Une brisure ? Le temps fera son œuvre aussi sur les logiciels, qui repèreront nos changements d’habitude, referont le travail d’apprentissage, dans notre sillage. A l’échelle d’une vie, mes logiciels et moi-même évoluerons en duo, jumeaux, accordés. Mais, loin des moyennes, dans ma vie de tous les jours, dans mon présent, comment les machines apprendront-elles la délicatesse des amies et des proches ? Cette délicatesse qui permet d’éviter les sujets qui assombrissent, de ménager les esprits et les cœurs, de faire une ellipse, de comprendre que pas maintenant mais sans doute plus tard, de garder le silence. Cette délicatesse qui nous rend si précieux.
Je n’ai rien trouvé sur la question. Je scrute les internets et je vous tient au courant.
PS : quelques articles sur l’intersection homme, machine et émotion, en attendant
- What happens when a computer runs your life
- Les émotions aliens, possible ou pas ?
- L’apprentissage de plus en plus rapide des logiciels (oldies, but goodies)
- Comment vivre avec les robots étrangement humains
Effectivement, rien n’est possible sans la différence. Il n’y a donc pas d’intelligence artificielle qui comprenne la bêtise, le génie, l’amour ou la haine, la tendresse ou le remord. La machine ne peut comprendre seule qu’un été le violet soit à la mode et l’année d’après le rose. Le seul moyen serait que la machine nous guide et nous amène à la décision. C’est donc la robotisation de l’homme qui est dangereuse mais pas la machine qui deviendrait humaine.